Peau d’âne (Le Cabinet des Fées)

peau_dane_cabinet_des_fees.jpgLe Cabinet des Fées (1785-1789) est un recueil de contes assemblés par Charles-Joseph Mayer en quarante et un volumes. Des textes de conteurs et conteuses connus y figurent, comme Charles Perrault, Madame d’Aulnoy, Mademoiselle de La Force, Madame de Murat, ou encore Mademoiselle Lheritier. « Peau d’âne » de Charles Perrault y trouve sa place dans le premier volume. Dans chaque volume se trouvent des illustrations de Clément-Pierre Marillier. L’illustration choisie de « Peau d’âne » est la troisième gravure qui figure dans ce volume.

Une reine, sur le point de mourir, fait promettre à son mari de ne pas se remarier, à moins qu’il ne trouve une épouse plus belle qu’elle. Or, la seule personne plus belle que la reine est sa propre fille. Afin d’échapper à ce mariage, la princesse demande à son père, sur les conseils de sa marraine, trois robes irréalisables, mais celui-ci parvient à les lui offrir. En dernier recours, la princesse demande à son père de tuer son âne merveilleux qui produit de l’or. Le roi s’exécute et la princesse s’enfuit du château, vêtue de la peau de l’âne. Sous ce travestissement, Peau d’âne devient servante et continue de porter ses robes le dimanche dans sa chambre. Un jour, un prince l’aperçoit ainsi parée et s’éprend d’elle. Il demande à ce que Peau d’âne lui cuisine un gâteau et la jeune fille y laisse tomber sa bague. Le prince fait essayer celle-ci à toutes les demoiselles du pays, mais elle ne convient à aucune d’entre elles. Peau d’âne se soumet également à cette épreuve, enfile à son tour la bague, se débarrasse de sa peau animale et épouse le prince, libérée de l’union incestueuse.

Le désir interdit et immoral du père pour sa fille est au cœur de ce conte, et oblige la princesse à quitter le royaume. La peau revêt ici plusieurs fonctions. Tout d’abord, elle est le signe de la bestialité du désir du père. De plus, la peau est celle d’un âne, elle figure de ce fait la souillure qui a bien failli marquée la jeune fille. Or, si la peau porte parfois préjudice aux personnages de conte, en les faisant paraître monstrueux, ici, la peau est protectrice et salvatrice. Elle apparaît aussi comme une sorte de cocon duquel sortira une belle jeune fille prête à épouser un prince.

L’illustration de C-P. Marillier est accompagnée dans un encart de la phrase « Est-ce vous qui logez au fond de cette allée obscure, dans la troisième Basse-Cour de la Métairie ? ». Cette citation n’est pas présente dans le texte en vers de Perrault, elle est extraite de la version en prose proposée dans Le Cabinet des Fées. La première version en prose, où se lit également cette citation, date de 1781. Dans Le Cabinet des Fées, nous ne trouvons donc pas le texte original de C. Perrault. Cette citation est d’une grande importance puisque, dans la version en prose, le prince vérifie, en questionnant la jeune fille, que c’est bien elle qu’il a vue si belle dans une chambre au fond de l’ « allée obscure ». Le prince paraît donc plus réticent à l’épouser quand il la voit recouverte de sa peau d’âne que dans la version en vers. Pour que la noce ait lieu, il s’assure de la beauté et de la sincérité de sa promise. De plus, dans cette réécriture, la « métamorphose » de l’héroïne est plus spectaculaire que dans la version en vers. Alors que dans le texte de Perrault, la jeune fille porte uniquement sa peau d’âne et demande à se changer avant de rencontrer le roi, dans la version en prose, l’effet de surprise est extraordinaire. La protagoniste porte sous sa peau un très bel habit, ce que nous pouvons voir dans l’illustration de C-P. Marillier. Ainsi, lorsqu’elle laisse tomber la peau animale, elle semble se métamorphoser sous les yeux ébahis du prince. La scène montrée dans cette gravure se situe dans le dénouement du conte, lorsque Peau d’âne essaye la bague, avant d’être mariée au prince. La jeune fille est représentée recouverte d’une peau, mais celle-ci laisse cependant deviner sa féminité puisque l’apparence de l’héroïne, et son vêtement, se dévoilent sous la peau animale. Le prince et la princesse se regardent, celle-ci tend la main vers lui pour essayer la bague. La scène se déroule en intérieur, dans un luxueux château, de nombreuses personnes y assistent, dont le roi et la reine, représentés avec une couronne. Cette scène marque le renversement de situation et sert de seuil au dénouement, elle marque le moment de la révélation et l’identification de la bague déclenche le changement d’état, ce qui explique pourquoi elle fait l’objet d’une illustration, puisqu’elle sera déterminante pour la fin heureuse du conte.

Références

Editeur

chez Barde, Manget & Compagnie, chez Cuchet

Contributeur

Florie Maurin

Date

Ce conte paraît d’abord en 1694 chez les Coignard, avec Griselidis et Les Souhaits ridicules. Le premier volume du Cabinet des Fées, dans lequel figure le conte « Peau d’âne », paraît en 1785.

Format

in-octavo (22x12cm)

Identifiant

ark:/12148/bpt6k65804141

Gestion des droits

Domaine public.

Langue

français