Blanche-Neige

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Momo Takano, jeune artiste japonaise, dans un graphisme propre inspiré pour partie par les enluminures slaves et la peinture de Chagall, propose une lecture singulière du conte qui est signifiée dès la page de couverture par une mise en abyme : Blanche Neige faisant la lecture de son propre conte aux nains qui l’entourent et dirigent tous leur regard vers nous, lecteurs, positionnés dans l’au-delà du livre. Cette lecture se démarque de biens des illustrations du conte de plusieurs manières. Dans la scène initiale, la mère, sorte de matriochka vêtue d’une large robe de dentelle blanche repose sur une chaise et ne regarde pas par la fenêtre : la fenêtre est en elle, découpée au centre de son ventre, grande ouverte sur une nuit bleue floconneuse, image de la fécondité à venir. Dans sa robe de cristaux neigeux se découpe la matrice qui contient la promesse d’une fille de neige. Une goutte de sang imperceptible  sur le mouchoir, des menaces latérales (un corbeau noir, un poisson bleu). Le sang visible, c’est Blanche-Neige qui le porte sous la forme d’une robe rouge flamboyante, inhabituelle, qu’elle ne quittera qu’à la toute fin (le jour de son mariage) pour une autre… en dentelle blanche, semblable à celle de La madone du village de Chagall et bien proche de celle de sa mère, par où la lignée s’affirme et se referme. Dans l’intervalle, signe d’une transition, son corps au buste rouge aura reposé sur une couche de dentelle blanche fleurie, le prince, mimétique, au juste-au-corps blanc et à la cape rouge, l’aura délivrée du sommeil. Dans l’intervalle aussi, la reine aura commis ses méfaits. Créature hybride, sorte de monstre marin au sang froid, sorti de l’enfer médiéval des profondeurs, elle se présente, de bleu vêtue, comme une sirène inversée : sur sa tête repose une coiffe démesurée en forme de corps écaillé et étêté de poisson. Le miroir, quant à lui, n’est pas littéralement présent (alors même que la sirène est souvent représentée tenant en main un miroir). Il est là cependant mais vide d’intention et de reflet sur la page de gauche. Et il l’est métaphoriquement dans deux scènes troublantes. Dans la première, telle une sorcière soumise au supplice, assise dans un chaudron sous lequel brûle un feu d’enfer, la reine contemple son image à la surface de l’eau bouillante. Dans la seconde, figure une énorme pomme rouge étalée de part et d’autre de la pliure de la double page ; sur la côté gauche de la pomme, le visage collée à sa peau et le regard tourné vers la droite, la reine parvient à voler la couleur rouge de sa rivale  mais point son visage ; sur le côté droit de la pomme, fondue dans sa chair et comme happée par elle,  Blanche-Neige, naturellement rouge, tourne son regard vers l’au-delà de la page. Une petite fenêtre, désormais fermée, se dessine sur la pomme. On ne saurait mieux dire, à l’aide de cette pomme-miroir, la tentative de captation de la beauté de l’autre et, en même temps,  le rêve impossible de fusion  de la Reine avec cette autre qui lui échappe  aux limites de la page, le dos tourné. La reine achève son destin cou coupé. Et le miroir muet opacifié du début retrouve in fine sa fonction. Il reflète le couple et se fait cadre pour leur portrait de mariage.

Références

Editeur

Minedition

Contributeur

Catherine Tauveron

Date

2011

Format

Livre 24 x 29,3 cm ; 32 pages

Identifiant

ISBN 978-2-35413-145-6

Gestion des droits

Minedition

Langue

français